/e/ exposition/programmation / De la tendresse, vol.II, an anti-critical show by Placement Produit
by Eladio Aguilera, Sosthène Baran, Taisiia Cherkasova, Max Fouchy, Misha Gudwin, Clémence Mars, Pierre-Alain Poirier, Iuliia Skromnaya 05/04/24 (Thurs), 17:00 N°.001 posted 5 months ago
Dans la continuité directe du premier volet de l’exposition De la Tendresse, le projet prend pour point de départ la volonté de produire une exposition absolument anti-critique et dénuée d’ironie. Un parallèle est proposée entre la tendresse vécue entre les être au sein du foyer et celle vécue avec les objets du quotidiens: la maison glisse de l’espace symbolique vers la matérialité.
Les artistes viennent alors confronter à l’espace post-industriel de POUSH - typique des ateliers d’artistes du bassin parisien - des œuvres sensibles invoquant l’univers domestique; ils se font bergers d’un ensemble de gestes qui s’inscrivent dans le champ d’une tendresse quotidienne, comme les traits d’union entre les êtres et les artefacts.
ROOM TOURS
Je vais te laisser entrer vraiment, vraiment chez moi.
L’inhabité est toujours occupé, son vide sait se remplir. Son rien ? Un tout.
Faut que je trouve quelqu’un, tout seul, c’est tout moi, tout moi.
C’est mon panier à souvenirs, y’a pleins de trucs dedans depuis le collège.
Au dedans il n’y a presque pas d’âge ou plutôt il y a trop d’âges. Ils s’empilent, se renouent, remuent dans ce ménage mais ne passent jamais.
Quand on a dix-neuf ans dehors, chez soi on en a encore que dix-huit, douze ou six. Alors on bataille, on crève les derniers restes de reste, dans les moindres recoins de recoins. Le fameux ballon des dix-neuf, j’ai éclaté celui des dix-huit ans parce que ça y est il était énorme et qu’il se dégonflait pas. Puisque les anniversaires ne s’éteignent pas, puisqu’au contraire tout avance, il faut éclater.
S’éclater. Relire par derrière ce qui s’oublie, le relier avec ce qui va s’oublier. Ma boîte à souvenirs : y’a des trucs qui rentrent pas dedans, c’est mes p’tits souvenirs. Un âge ça ne se rentre pas, ça traine à en laisser des traces. Impossible de l’emboîter, ça déborde, ça déboîte.
Une p’tite célébration à ma chambre qui a lieu aujourd’hui ! D’habitude c’est plutôt les verrous, les culs de sac fermés à double et en demi-tours, les serrures comme des coquilles. Ici il n’y a même pas de porte. Hello bienvenue chez nous. Rien à ouvrir, personne à faire entrer. C’est là qu’on enlève les chaussures.
Le chez et le simplement là se confondent. La pièce apparaît, saute devant nous, bondit et nous entoure. Aller dehors, voir la partie extérieure. Une antichambre forte qui n’existe qu’en dehors. Un contre espace retourné en doigt de gant. Le seulement intérieur se retrousse, on voulait s’étaler dans l’entrée, ou étaler l’entrée au-delà de ses murs.
Et puis ce plan nu, ces cloisons qui se gonflent vers l’extérieur, ce fourre tout, vêtements de maisons, roulés en boule ici. Pour être célébrés ils se pénètrent et s’incarnent, c’est-à-dire se lient à nouveau en dedans. Enroulés ensembles dans les étagères, ils retrouvent leur influence. A l’extérieur par contre tout s’éloigne, se traverse par afflux. Tout est hors de portée. Dehors sans porte.
Une chambre est une infratopie. Un lieu du dessous pris par le dessus, toujours référé par ce qui le surplombe. Ce fond plat, déjà fin en soit, peut être démonté en maison de poupée. Sous les voûtes et les plafonds existe encore, après la fin, une chambre.
Faire vie chez soi serait donc peut-être faire vie sous la surface : mystère, tout ce que j’aime, réfs à moi même, codes maculés. Dans ma chambre se confondent mes peluches, mes livres et mes amours nocturnes, tous extraits d’un extérieur périlleux qui, de nouveau ailleurs, retrouvent le réconfort d’un intérieur enfoui, d’un là devenu chez, en dehors du dehors, nouvelle foule loin de la foule.
Tout ce que j’aime, tous ceux que j’aime.
Un autre endroit à nous, on est toujours côte à côte avec Tom on se met ensemble. D’une côte à l’autre, de ces deux côtés, les corps se resserrent. Point de contact, entre les côtes en tact. De ces petits fouillis et des quelques bricoles, comme des points saillants qui nous guident, jaillit finalement la combinaison du casse-tête. L’être ensemble, celui des corps, des mots, des objets retrouvés, révèle le grand ensemble secret dans lequel il a été possible de dire que nous
étions chez nous avec d’autres.
Tous.tes retrouvé.es entre deux hémisphères. Tom c’est vraiment ma moitié : deux semis qui font un tout, s’englobent sous cette sphère domestique. Parfois c’est vrai on a besoin de son amoureux, non ?
Chez soi il faut s’enfouir, terraformer le méconnu, habiter c’est habiliter. J’ai les pieds sur mon parquet, on est dans l’appartement. Mais cette matière ne suffit jamais. Quelle est cette texture vraiment, vraiment plus intime ? Tout mon bordel soudain s’échappe, pour lui résister elle dit c’est organisé dans ma tête.
C’est mon amoureux en fait je mets son parfum sur mon oreiller pour avoir son odeur. Ca m’aide beaucoup quand j’ai des p’tits coups de mou. De toute façon moi c’est partout.
J’ai l’impression d’être dans une petite cabane j’adore.
Mon H24, mon quotidien, ma petite grotte.
Fin fond.